Les données des centres clinico-biologiques et des laboratoires autorisés à pratiquer des inséminations intra-utérines permettent de décrire l’ensemble des activités d’assistance médicale à la procréation (AMP) réalisées en France en 2022, ainsi que les tendances constatées entre 2019 et 2022. Il est ainsi possible d’observer l’évolution du volume d’activité des différentes techniques d’AMP, notamment celles liées aux dons, à la préservation de la fertilité ou à l’utilisation de techniques particulières. Cette présentation de l’activité permet d’ouvrir des pistes de réflexion et d’analyses complémentaires.
Par ailleurs, l’Agence de la biomédecine a développé d’autres rapports annuels d’évaluation disponibles sur le site de l’Agence dont notamment :
- Des fiches régionales décrivant l’activité au niveau de chaque région et proposant des éléments de réflexion aux agences régionales de santé en charge des autorisations d’activité[5],
- Des rapports annuels d’évaluation des résultats des centres prenant en compte les caractéristiques de la patientèle (en particulier l’âge des femmes), à destination des centres d’AMP en vue d’amélioration des pratiques[6].
[5] https://www.agence-biomedecine.fr/Activite-regionale-AMP
Bilan de l'activité
En 2022, les tentatives d’AMP ont légèrement diminué (- 2,3% par rapport à 2021), mais restent d’un niveau comparable à l’avant crise sanitaire de 2020 (période au cours de laquelle les recommandations de l’Agence de la biomédecine ont conseillé un report des activités cliniques et biologiques entre le 25 mars et le 13 mai 2020) : 158 826 tentatives d’AMP (+ 0,4% par rapport à 2019) ont été recensées, regroupant des inséminations intra-utérines (IIU), des fécondations in vitro (FIV) avec ou sans micro-injection (ICSI) et des décongélations d’embryons congelés[7] avec gamètes et embryons issus ou non d’un don ou d’un accueil d’embryons (tableau AMP1, tableau AMP2).
Au total près de 27 000 enfants[8] sont nés d’une AMP réalisée au cours de l’année 2022, dont 7 % d’enfants issus d’un don (près de 1 920 enfants, tableau AMP1).
Les inséminations intra-utérines
Les IIU (42 930 cycles) occupent toujours une large place au sein des activités d’AMP (27 % de l’ensemble des tentatives). Elles font appel aux spermatozoïdes de donneurs dans 11,1 % des cas (tableaux AMP1, AMP2). Cette proportion est en augmentation (+ 5,8 points par rapport à 2021) depuis l’ouverture de l’AMP aux couples de femmes et femmes non mariées. Souffrant dans de moindres mesures de problèmes de fertilité, ces dernières débutent majoritairement leur parcours par des cycles d’inséminations.
Les cycles d’inséminations, moins invasifs et coûteux qu’une fécondation in vitro contribuent à 19,4 % (n= 5 187) des naissances issues d’une AMP répertoriée en 2022 (16,2 % pour les IIU avec spermatozoïdes de conjoint et 3,1% pour les IIU avec spermatozoïdes issus de tiers donneur).
Les ponctions d’ovocytes
Les prélèvements d’ovocytes en vue de fécondation in vitro réalisés pour près de 49 080 couples représentent 59 411 ponctions auxquelles il faut ajouter 943 prélèvements d’ovocytes en vue de don (tableau AMP34). De plus, des autoconservations médicales et non médicales d’ovocytes ont été réalisées pour respectivement 4 012 et 1 759 patientes (tableau AMP68, tableau AMP74).
Les fécondations in vitro en vue de transfert d’embryons
En 2022, 33 965 actes de transferts d’embryons frais ont été réalisés par les centres clinico-biologiques et ont permis la naissance de 33,2% (n=8 900) des enfants issus d’une AMP réalisée en 2022.
Le recours à l’ICSI est stable depuis plusieurs années et représente 67,5 % de l’ensemble des tentatives de fécondation in vitro quelle que soit l’origine des gamètes utilisés (tableau AMP1). On peut remarquer que la pratique de l’ICSI est principalement choisie lorsqu’il est fait appel à des ovocytes ou des spermatozoïdes issus de don (respectivement 98,5% et 89,4%, tableau AMP1).
En outre, les décongélations embryonnaires sont en constante augmentation (+5% par rapport à 2021, +17% par rapport à 2019) et concernent en 2022, 46,8 % des tentatives d’AMP hors inséminations intra-utérines (41,7 % en 2019, 44,6% en 2021). Ces embryons issus de fécondations in vitro réalisées en 2022 ou antérieurement, sont des chances supplémentaires de concrétiser le projet d’enfant des couples et des femmes non mariées. Ces tentatives de transfert d’embryons congelés ont été réalisées en 2022 pour près de 37 620 couples ou femmes et ont contribué à faire naitre 47,4% (n=12 711) des enfants issus d’une d’AMP réalisée en 2022.
Les activités d’AMP avec tiers donneurs
Globalement les tentatives d’AMP (IIU, FIV hors ICSI, ICSI et décongélations d’embryons) sont réalisées (tableaux AMP1 et AMP2) avec les gamètes des deux membres du couple (homme/femme) dans 93,3 % des cas, et avec des ovocytes, des spermatozoïdes, ou des embryons issus d’un don dans 6,6 % des cas (4,3% en 2021). Par ailleurs parmi les tentatives réalisées avec des gamètes de tiers donneurs, les tentatives avec spermatozoïdes de donneurs sont majoritaires (72%, tableau AMP1, tableau AMP2).
[7] Dans la totalité du document on entend par « embryons congelés » à la fois les embryons congelés par la technique de congélation lente et par la technique de congélation rapide (la vitrification), ainsi que les embryons congelés à un stade précoce (J2-J3) ou à un stade plus tardif (stade blastocyste).
[8] Ce chiffre inclut le nombre d’enfants nés vivants et une estimation du nombre d’enfants nés vivants parmi les enfants dont le statut vital est inconnu considérant 1,5% d’enfants morts nés (incluant les IMG réalisées sur des fœtus de plus de 22 semaines d’aménorrhée ou de plus de 500g).
Les différences observées sur les taux de grossesse et d’accouchement en fonction des techniques et de l’origine des gamètes (figures AMP1 et AMP2) sont liées aux indications de ces différentes techniques d’AMP (causes de l’infertilité, pathologies associées, etc.), aux procédés eux-mêmes et aux caractéristiques des patients (âge, indice de masse corporelle…).
Des chances de succès supplémentaires sont offertes aux couples dès lors qu’il a été possible de conserver des embryons surnuméraires. Dans 55,1 % des tentatives de fécondation in vitro réalisées en 2022, une congélation embryonnaire a été effectuée. Les couples peuvent ainsi bénéficier d’un ou de plusieurs transferts embryonnaires supplémentaires en cas d’échec d’un transfert d’embryons frais ou congelé, ou bien mener à bien un nouveau projet parental.
Les chances de réussite de l’AMP après décongélation d’embryons (23,1 % d’accouchements par décongélation en intraconjugal ou avec don de spermatozoïdes) sont d’ailleurs en amélioration continue (21,2% en 2019) : Le recours à la culture prolongée qui concerne 80,5 % des transferts d’embryons congelés (contre respectivement 54,1 % et 47,6 % des transferts d’embryons frais après FIV hors ICSI et ICSI, tableau AMP81) et la pratique de la congélation de toute la cohorte embryonnaire transférable choisie pour partie pour des patientes à « bon pronostic » peut expliquer les résultats supérieurs après décongélation d’embryons.
Selon l’INSEE[9], en 2022, 725 997 nouveau-nés ont vu le jour en France. Les enfants nés vivants, issus d’une AMP réalisée en 2022, au nombre de 26 798, représentent 3,7 % des enfants nés de la population générale. Ce nombre d’enfants nés est modérément sous-estimé en raison des 204 enfants nés après AMP réalisée en 2022 dont le statut vital n’a pas été renseigné dans les données transmises, et de l’absence de déclaration d’activité de centres d’AMP et laboratoires de biologie médicale[10]. La proportion d’enfants conçus par AMP parmi les enfants nés chaque année en France poursuit depuis plusieurs année sa progression, après la baisse propre au contexte sanitaire constatée en 2020 (2,6 % en 2009, 3,6 % en 2019, 2,7 % en 2020, 3,8 % en 2021).
On estime que près d’un enfant sur 27 est issu d’une AMP (1/28 en 2019).
La figure AMP3 montre la part respective des enfants nés selon les techniques d’AMP. On note ainsi parmi les 26 798 enfants nés issus d’une AMP réalisée en 2022 :
- 33,2% (8 900 enfants) sont nés après un transfert immédiat d’embryons issus d’une fécondation in vitro (FIV hors ICSI et ICSI). Cette proportion a diminué de 3,7 points (36,9% en 2021).
- 47,4% (12 711 enfants) sont issus d’une décongélation embryonnaire. Ce nombre en constante augmentation (16,1% en 2013, 37,4 % en 2019, 42,7 % en 2021) témoigne de la diminution du nombre moyen d’embryons transférés à chaque transfert, et de la place croissante des transferts différés d’embryons dans la stratégie de prise en charge des couples en AMP.
Ces évolutions sont favorisées par la vitrification embryonnaire, la meilleure survie des embryons après réchauffement, et pour partie le développement de la culture prolongée.
- 19,4% (5 187 enfants) ont été conçus par insémination intra-utérine, technique d’AMP la plus simple à mettre en place, la moins invasive et la moins coûteuse. L’insémination intra-utérine vient ici confirmer sa place au sein des traitements de l’infertilité.
[9] Source : https://www.insee.fr/fr/statistiques/2381380#tableau-figure1
En 2022, le volume global des activités d’AMP est stable par rapport à l’avant crise sanitaire (+ 0,4% par rapport à 2019). Du fait de la pandémie les centres d’AMP avaient connu une période d’arrêt entrainant une baisse d’activité ; et légèrement en diminution en comparaison de l’exercice 2021 (- 2,3%).
En outre, on remarque :
- Une diminution globale des inséminations intra-utérines (- 8,5% par rapport à 2021). Cependant, à l’échelle des inséminations avec spermatozoïdes de donneurs, on observe une augmentation par 1,9 du nombre d’inséminations, conséquence de l’accès à l’AMP aux couples de femmes et femmes non mariée. Cette technique occupe toujours une large place au sein des activités d’AMP : 27 % de l’ensemble des tentatives de 2022 (30 % en 2019).
Le taux de succès après insémination avec spermatozoïdes de donneurs qui étaient ces 3 dernières années proche de 20,5% a diminué de 3 points en 2022 (17%) (Don de spermatozoïdes). Les taux succès en intraconjugal sont quant à eux stables (10%).
- Une hausse du nombre de décongélations d’embryons en vue de TEC (+17% entre 2019 et 2022). Les décongélations embryonnaires représentent plus d’un tiers des tentatives (34% en 2022). Cette proportion augmente chaque année (29% en 2019), ce qui traduit l’évolution des pratiques avec le développement du transfert mono-embryonnaire, la technique de vitrification embryonnaire et la culture prolongée, l’objectif poursuivi de l’ensemble des équipes étant de limiter le nombre de grossesses multiples et augmenter les chances d’obtenir une naissance à partir d’une seule tentative.
- Le recours à l’ICSI, technique pratiquée en fonction des paramètres spermatiques et ovocytaires (lors de vitrification préalable) et afin de minimiser les échecs de fécondation, représente 67,5% de l’ensemble des tentatives de fécondation in vitro quelle que soit l’origine des gamètes utilisés. Ce chiffre est stable depuis plusieurs années.
- Une progression des tentatives réalisées avec des ovocytes de donneuses en lien avec l’augmentation du nombre de donneuses liée notamment à l’ouverture du don de gamètes aux femmes n’ayant pas procréé. Cette dynamique ne permet pas de satisfaire la demande : chaque année des couples receveurs sont nombreux en attente de l’attribution d’ovocytes (cf. Don d'ovocytes). Néanmoins, on note pour les couples pris en charge de meilleurs taux de succès de l’AMP avec ovocytes de donneuses. Ces taux de succès contribuent ainsi à la prise en charge d’un nombre croissant de couples.
- Une nette progression du nombre de donneurs (+ 79%) nécessaire pour constituer le nouveau stock de paillettes de spermatozoïdes (stock de donneurs ayant consenti à donner accès à leur origine). Le recrutement des donneurs sera un enjeu pour répondre à la demande massive des couples de femmes et des femmes non mariées, et éviter toute situation de pénurie.
- Un nombre de patients bénéficiant d’une conservation de gamètes en vue d’une préservation médicale de la fertilité visant à donner la possibilité de recourir à une AMP pour un projet parental ultérieur, est en hausse : 8 751 (+18% par rapport à 2021), 4 012 (+30%) de personnes ayant respectivement conservé leurs spermatozoïdes et leurs ovocytes.
L’ouverture de l’autoconservation des gamètes dans un cadre non médical a bénéficié à près de 1 800 femmes (cf. Autoconservation non médicale de gamètes).
Globalement, les taux d’implantation embryonnaire ont augmenté progressivement au cours de ces dernières années pour la majorité des techniques (tableaux AMP4). Cette évolution peut être liée à la hausse des transferts d’embryons obtenus après culture prolongée (cf. Culture embryonnaire prolongée).
En parallèle, l’évolution croissante du transfert mono-embryonnaire se poursuit (tableau AMP3) : ces transferts représentent en 2022, 73,5 % des transferts réalisés après fécondation in vitro (FIV ou ICSI) (60,6 % en 2019), et 88,9 % des transferts d’embryons décongelés (80,2 % en 2019).
Cette approche stratégique combinée à une amélioration des taux d’implantation conduit à une diminution progressive de la part des grossesses multiples (5,9 % en 2022 contre 9,1 % en 2019 après FIV/ICSI, 3,7% contre 5,5% après TEC), limitant ainsi les risques durant la grossesse pour la santé des femmes et des enfants à naître.
La proportion de grossesses multiples après IIU est supérieure à celle observée après fécondation in vitro (8,5 % en 2022, tableau AMP3).